Les atouts de la donation-partage transgénérationnelle
Qu’est-ce qu’une donation-partage transgénérationnelle ?
Consacrée par le législateur en 2006 pour tenir compte de l’allongement de l’espérance de vie, la donation-partage transgénérationnelle permet à l’ascendant de faire la distribution et le partage de ses biens entre des descendants de degrés différents. Concrètement, l’ascendant transmet directement à ses petits-enfants, sans allotir ses enfants, en pratiquant un saut de génération.
Elle peut porter sur des droits en pleine propriété ou en nue-propriété.
Pourquoi y recourir ?
Les objectifs poursuivis peuvent être divers : aider les jeunes générations, préparer sa succession et anticiper les conflits, optimiser le coût fiscal de la transmission.
L’accord de la génération intermédiaire
L’ascendant qui décide d’y recourir doit obtenir le consentement de ses enfants. Ces derniers ont en effet la qualité d’héritiers réservataires, c’est-à-dire qu’une partie de la succession de leur parent leur est réservée. Ils doivent donc accepter que leurs propres enfants soient allotis en leur lieu et place, en tout ou partie, et donc renoncer à tout ou partie de leur réserve au profit de ces derniers.
La donation-partage transgénérationnelle offre une certaine souplesse à l’ascendant donateur qui peut choisir d’allotir des petits-enfants seulement, ou des petits-enfants en même temps que des enfants.
Il est aussi possible d’incorporer des donations antérieures (comme dans une donation-partage classique). Ici, la spécificité réside dans la possibilité pour l’ascendant de redistribuer le bien initialement transmis à son enfant aux enfants de celui-ci (et de réaliser le saut de génération a posteriori). Bien entendu, les enfants devront consentir à cette redistribution.
Quelle fiscalité ?
Sur le plan fiscal, les droits de donation sont liquidés en fonction du lien de parenté entre l’ascendant donateur et les descendants allotis. Ainsi, le petit-enfant ne peut pas bénéficier de l’abattement de 100 000 € de l’enfant, bien qu’il soit alloti à sa place par l’ascendant donateur. Dans ce cas, c’est l’abattement grand-parent – petit-enfant de 31 865 € qui s’applique.
En cas de réincorporation d’une donation antérieure avec changement d’attributaire (le bien initialement donné est réattribué à un enfant du premier donataire), la fiscalité diffère selon la date à laquelle la donation a été consentie.
- Si la donation réincorporée a été consentie plus de 15 ans avant la donation-partage transgénérationnelle, seul le droit de partage (au taux actuel de 2,50 %) est dû. L’assiette du droit est la valeur du bien à la date de la réincorporation.
- Si elle a été consentie il y a moins de 15 ans, alors les droits de donation sont dus, en fonction du lien de parenté entre l’ascendant donateur et le petit-enfant alloti (application de l’abattement de 31 865 €). Les droits acquittés lors de la donation initiale s’imputent sur les droits qui seraient dus lors de la réincorporation.
Exemples
Exemple 1 : un cas simple de donation-partage transgénérationnelle
Monsieur DURAND, divorcé, 75 ans, a un fils, Marc, âgé de 50 ans. Marc a lui-même deux enfants, Claire (23 ans) et Céline (19 ans).
Monsieur DURAND est notamment propriétaire de 2 studios, d’une valeur de 150 000 € chacun. Son fils ayant une très bonne situation, il souhaite donner les 2 studios directement à ses petites-filles pour leur procurer des revenus locatifs, sans allotir son fils.
Chaque studio vaut 150 000 €. Pour les besoins de cet exemple, nous supposons que les abattements en ligne directe (100 000 € entre parent et enfant et 31 865 € entre grand-parent et petit-enfant) ne sont pas consommés.
– 1ère hypothèse : Monsieur DURAND donne les 2 studios à son fils Marc et ce dernier les donnent ensuite à ses filles (1 studio chacune).
Temps 1 : calcul des droits de donation dus par Marc :
Valeur donnée à son fils |
300 000 € |
Abattement applicable |
100 000 € |
Assiette taxable |
200 000 € |
Droits de donation |
38 194 € |
Temps 2 : calcul des droits de donation dus par chacune des filles de Marc :
Valeur donnée à chaque fille |
150 000 € |
Abattement applicable |
100 000 € |
Assiette taxable |
50 000 € |
Droits de donation |
8 194 € |
Au final, les droits de donation cumulés sont de 54 582 € (38 194 + 8 194 * 2), soit 18,20 % de la richesse transmise au sein de la famille (54 582 / 300 000).
– 2ème hypothèse : Monsieur DURAND donne directement les studios à ses petites-filles, avec l’accord de leur père.
Les droits de donation sont liquidés en fonction du lien de parenté entre le donateur (grand-père) et les descendants allotis (les petits-enfants).
Calcul des droits de donation dus par chacune des petites-filles :
Valeur donnée à chaque petite-fille |
150 000 € |
Abattement applicable |
31 865 € |
Assiette taxable |
118 135 € |
Droits de donation |
21 821 € |
Au final, les droits de donation cumulés sont de 43 642 € (21 821* 2), soit 14,55 % de la richesse transmise au sein de la famille (43 642 / 300 000) et une économie globale de droits de donation de 10 940 € grâce au saut de génération.
Outre le gain fiscal, la donation-partage transgénérationnelle permet de sécuriser civilement la transmission du patrimoine familial, grâce à un partage anticipé, avec l’accord de chaque partie prenante.
Exemple 2 : réincorporation d’une donation antérieure
En 2002, Monsieur Jean DUBOIS a donné la pleine propriété de 2 appartements à son fils Paul. Ce dernier a 2 enfants, Jules et Charles, à qui il souhaite transmettre la pleine propriété de chaque appartement (estimé à 300 000 € en 2020, soit 600 000 € au total). A ce jour, Paul n’a pas consenti de donation à ses enfants. L’entente familiale est bonne entre les 3 générations.
– 1ère hypothèse : Paul consent une donation-partage à ses 2 fils en leur attribuant à chacun un appartement.
Chaque enfant devra acquitter 38 194 € de droits de donation soit un coût fiscal global de 76 388 € (hors frais et émoluments du notaire).
Valeur donnée à chaque enfant |
300 000 € |
Abattement |
100 000 € |
Assiette taxable |
200 000 € |
Droits de donation |
38 194 € |
– 2ème hypothèse : réincorporation des biens donnés à Paul dans une donation-partage transgénérationnelle.
Jules et Charles, petits-enfants du donateur (Jean DUBOIS) sont allotis en lieu et place de leur père Paul, et avec l’accord de celui-ci, au moyen des 2 appartements réincorporés (ils reçoivent chacun un appartement en pleine propriété, directement de leur grand-père).
La donation réincorporée ayant été consentie à Paul il y a plus de 15 ans, seul le droit de partage est exigible : 600 000 € * 2,5 % = 15 000 €
Conclusions :
- Un gain fiscal de plus de 60 000 € (10 % de la valeur actuelle des biens).
- Outre ce gain fiscal immédiat, la donation-partage transgénérationnelle permet ici de préserver l’abattement de 100 000 € de chaque enfant vis-à-vis de leur père Paul, et les tranches basses du barème.